Cela fait dix ans que la Suisse est entrée dans l’espace Schengen/Dublin. Dans les faits, elle est la seule à appliquer le règlement si strictement: elle renvoie systématiquement les requérant-e-s d’asile dans le pays où ils ont foulé pour la première fois le sol de l’espace Schengen/Dublin, pour la plupart en Italie. Malgré la clause de souveraineté prévue par le règlement Dublin III, elle ne fait pratiquement pas d’exceptions, même pour les personnes vulnérables.
Les conséquences de cette pratique stricte, pour les personnes concernées, peuvent être illustrées par l’exemple de cette femme turque, entrée en Suisse par l’Italie et qui y a demandé l’asile. Malgré un suivi psychiatrique à Zurich, les autorités suisses l’ont renvoyée en Italie sans se renseigner sur un éventuel suivi médical. Cette femme, qui avait de forts risques de se suicider en raison d’un syndrome de stress post-traumatique, a été livrée à elle-même. Durant une semaine, elle a dû loger chez des connaissances, puis, à ses propres frais dans un hôtel. Les autorités italiennes l’ont par la suite placée dans un camp qui comptait principalement des hommes. Elle y est tombée malade et n’a été admise à l’hôpital qu’après deux semaines. Après des semaines d’attente, l’intervention d’une avocate de Varèse lui a permis de voir enfin un psychologue et d’emménager dans un refuge de secours pour femmes.
Ce cas d’espèce n’est que la pointe de l’iceberg. Le rapport de monitoring de l’OSAR et du DRC documente en détail treize destins individuels tragiques de personnes renvoyées de Suisse, des Pays-Bas, d’Allemagne, du Danemark, de Norvège et d’Autriche vers l’Italie. Des représentant-e-s des deux organisations ont observé le parcours de ces personnes, de mars 2017 à novembre 2018, et leur ont rendu visite personnellement en Italie.
Ces résultats alarmants montrent que les critiques de l’OSAR sur la pratique suisse de la procédure Dublin sont justifiées. L’hébergement, la prise en charge et l’entretien des requérant-e-s d’asile en Italie se sont encore détériorés sous le nouveau gouvernement depuis le dernier rapport de suivi de février 2017. Dans de nombreux cas, l’Italie ne remplit pas les obligations qui lui incombent en vertu du droit européen et international. L’OSAR demande à la Suisse de s’abstenir de renvoyer les personnes vulnérables et de veiller à ce que les demandes d’asile y soient examinées.
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