Ukraine : la Suisse doit participer à l’accueil solidaire des réfugié-e-s de guerre par le biais d’un statut S

03 mars 2022

L'agression russe en Ukraine devient de plus en plus brutale et les bombardements incessants des villes ukrainiennes font de plus en plus de victimes civiles. Des centaines de milliers de personnes ont pris la fuite ; elles cherchent refuge à l’intérieur du pays et dans les États voisins. L’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) demande à l'UE d’activer le mécanisme d'urgence pour la protection temporaire des réfugié-e-s de guerre. La Suisse doit y participer et accueillir rapidement et sans obstacle des personnes en quête de protection. Au vu de la situation actuelle, l'OSAR estime que le Conseil fédéral doit instaurer le statut de protection S : il faut laisser les personnes ayant besoin de protection accéder si nécessaire à la procédure d'asile, autoriser généreusement les regroupements familiaux et faciliter l'intégration professionnelle et sociale, car on ignore combien de temps durera le conflit.

À Bruxelles, les ministres de l'Intérieur et de la Justice de l'UE délibèrent aujourd'hui de la manière de gérer le flux de réfugié-e-s en provenance d'Ukraine et de soutenir les pays de premier accueil. La ministre de la Justice suisse Karin Keller-Sutter participe aussi à cette rencontre.

L’OSAR demande à l'UE d’activer immédiatement le mécanisme créé pour les situations d'urgence humanitaire de ce type, afin d’assurer la protection temporaire des réfugié-e-s de guerre en provenance d’Ukraine et de permettre de les répartir entre les pays européens. La Suisse doit participer à cet effort et instaurer le statut de protection S prévu par la loi sur l'asile, comme l’exige la situation actuelle.

Activer le mécanisme d'urgence de l'UE

L’utilisation de cette procĂ©dure non bureaucratique au sein l'UE requiert l’accord d’au moins 15 pays reprĂ©sentant au moins 65 pour cent de la population de l'UE, lors de la rĂ©union ministĂ©rielle qui se tient aujourd'hui-mĂŞme. L'application de la directive europĂ©enne en question ouvre alors en premier lieu deux possibilitĂ©s :

  • L’accueil solidaire des personnes ayant fui la guerre en Ukraine pour se rĂ©fugier dans les pays voisins par d'autres États de l'UE qui soulagent ainsi les pays de premier accueil (par analogie aux programmes de rĂ©installation). Il est primordial pour l'OSAR que tous les États de l'UE garantissent l'accès Ă  la procĂ©dure d'asile et des conditions d'accueil adĂ©quates Ă  toutes les personnes dĂ©placĂ©es par la guerre, sans discrimination.
  • La possibilitĂ© pour les personnes qui fuient dans les pays voisins de l'UE pour Ă©chapper Ă  la guerre russe contre l'Ukraine de se voir immĂ©diatement et facilement octroyer une protection temporaire avec certaines normes minimales incluant notamment un permis de travail, l’accès Ă  l’aide sociale, aux soins mĂ©dicaux et Ă  l’instruction pour les mineur-e-s, ainsi que la possibilitĂ© d’un regroupement familial au-delĂ  de la famille nuclĂ©aire. Ces normes sont appliquĂ©es selon la lĂ©gislation nationale.

La Suisse doit participer

La Suisse peut et doit participer Ă  ce mĂ©canisme d'urgence de l'UE et octroyer en toute simplicitĂ© une protection aux personnes dĂ©placĂ©es par la guerre par le biais du statut S. Le Conseil fĂ©dĂ©ral s’est dĂ©jĂ  dĂ©clarĂ© prĂŞt Ă  cela ; il s’agit maintenant de joindre l’acte Ă  la parole.

Le statut S a été introduit en 1998, en réaction aux mouvements migratoires suscités par les guerres des Balkans. Cet instrument qui permet d’octroyer rapidement une protection provisoire n’a toutefois encore jamais été mis en pratique à ce jour.

Assurer l’égalité de traitement

C'est pourquoi l'OSAR estime que le Conseil fĂ©dĂ©ral doit de toute urgence prĂ©ciser son application et l’adapter Ă  l’heure actuelle, afin de garantir au sein de l'Europe une Ă©galitĂ© de traitement des rĂ©fugiĂ©-e-s de guerre ukrainien-ne-s. Selon l’analyse de l’OSAR, voici les points auxquels il faut faire particulièrement attention dans le cadre de la mise en Ĺ“uvre :

  • L’application du statut S demande que le Conseil fĂ©dĂ©ral dĂ©finisse prĂ©alablement le groupe cible. Cette dĂ©finition doit laisser aux rĂ©fugiĂ©-e-s de guerre la possibilitĂ© d’accĂ©der si nĂ©cessaire Ă  la procĂ©dure d'asile. Le statut de protection S devrait donc s’appliquer aux « personnes que le conflit armĂ© Ă  obligĂ©es Ă  quitter l’Ukraine et qui ne souhaitent pas dĂ©poser une demande d’asile individuelle Â».
  • La Suisse doit garantir les mĂŞmes normes minimales que l’Union europĂ©enne. Il faut notamment une conception gĂ©nĂ©reuse du regroupement familial qui, Ă  l'instar de la directive europĂ©enne, ne doit pas se limiter Ă  la famille nuclĂ©aire.
  • L’accès au marchĂ© du travail doit ĂŞtre accordĂ© dĂ©jĂ  avant le dĂ©lai d’attente de trois mois.
  • Il faut prĂ©voir des prestations d'intĂ©gration pour les personnes concernĂ©es. La ConfĂ©dĂ©ration doit mettre Ă  disposition les moyens nĂ©cessaires sous la forme d'un crĂ©dit d'intĂ©gration. Comme on ignore encore l’évolution et la durĂ©e de la guerre en Ukraine et qu’on ne peut en tout cas pas exclure l’éventualitĂ© d’un enlisement du conflit, la protection doit ĂŞtre conçue et octroyĂ©e en tenant dĂ»ment compte des perspectives de sĂ©jour stable et d'intĂ©gration sur le long terme.

Symposium sur l’asile

Société civile et protection des personnes réfugiées : dans quelle mesure cet énorme potentiel peut-il être mis à profit, même en dehors des crises majeures ? Prenez part à la discussion.

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