Elections 2019 : la position des partis en matière de politique d'asile

03 octobre 2019

Le 20 octobre, la Suisse réélit son parlement fédéral. Nous avons donc épluché les programmes des huit principaux partis afin de connaître leur position sur les questions d’asile. Quelle politique d’asile prônent-ils et quelles solutions proposent-ils?

Les Verts dĂ©fendent une politique d’asile humaine et respectueuse des droits fondamentaux. « Quiconque, Ă  la recherche de la sĂ©curitĂ© et de perspectives, vient en Suisse, a le droit Ă  une procĂ©dure Ă©quitable et Ă  la solidaritĂ© sociale Â», peut-on lire dans le programme. Les Verts appellent Ă©galement Ă  accorder l’asile « en raison notamment de discriminations liĂ©es Ă  l’orientation sexuelle, Ă  l’identitĂ© de genre ou au sexe Â». Ils entendent par ailleurs promouvoir l’intĂ©gration Ă  tous les niveaux, mĂŞme pour celles et ceux dont la demande d’asile a Ă©tĂ© rejetĂ©e mais dont le renvoi n’est pas possible. Ils appellent Ă  « une rĂ©gularisation collective de tous les sans-papiers Â» après quatre ans. En outre, la Suisse doit se montrer solidaire et s’impliquer dans le sauvetage en mer, crĂ©er davantage de routes migratoires lĂ©gales, rĂ©introduire l’asile dans les ambassades et accueillir des contingents plus importants de rĂ©fugiĂ©s. Pour les Verts, il s’agit de privilĂ©gier une politique Dublin qui tend davantage vers la protection des rĂ©fugiĂ©s et de redĂ©finir le système afin de rĂ©partir les rĂ©fugiĂ©s en fonction des capacitĂ©s et besoins des personnes concernĂ©es et des pays d’accueil.

Le PS prĂ´ne une politique d’asile «active» et «solidaire au niveau international», qui privilĂ©gie la dignitĂ© humaine et une sociĂ©tĂ© inclusive et qui renforce les droits des rĂ©fugiĂ©s ancrĂ©s dans le droit international. Le PS rejette l’application « particulièrement stricte Â» du règlement Dublin par la Suisse: « La Suisse doit utiliser la marge de manĹ“uvre laissĂ©e par l’accord Dublin, afin de ne pas mettre Ă  mal les droits fondamentaux et les droits de l’enfant. Â» En matière de rĂ©installation, le PS souhaite des contingents plus Ă©levĂ©s et exige davantage de routes migratoires lĂ©gales ainsi qu’une implication de la Suisse dans le sauvetage en mer. Pour le PS, l’intĂ©gration est une « tâche constante et essentielle Â» et sa promotion doit permettre de garantir l’égalitĂ© des chances et la participation Ă  la vie publique. Le PS dĂ©fend le droit de vote et d’éligibilitĂ© des Ă©trangères et Ă©trangers, un droit civil plus simple et une « rĂ©gularisation contrĂ´lĂ©e Â» du statut de sĂ©jour des sans-papiers.

Le PEV est un parti socio-politiquement conservateur qui se situe au centre-gauche de l’échiquier politique sur les questions de politique d’asile. Pour le PEV, les personnes requĂ©rantes d’asile doivent ĂŞtre traitĂ©es humainement « indĂ©pendamment de [leur] statut de sĂ©jour et de [leur] origine Â». Parallèlement, le PEV appelle toutefois Ă  une solidaritĂ© toute particulière: « Les personnes persĂ©cutĂ©es doivent […] pouvoir compter sur notre protection; cela vaut en particulier pour les chrĂ©tiens qui sont soumis Ă  des rĂ©pressions de tout type dans leur pays par l’Etat et la sociĂ©tĂ© Â», est-il indiquĂ© dans leur programme. Le PEV est favorable Ă  des procĂ©dures rapides et correctes avec une protection juridique garantie. Toutefois, il ne formule aucune proposition visant Ă  amĂ©liorer la protection des rĂ©fugiĂ©s. Il s’agit d’encourager l’intĂ©gration. Il propose en outre d’accorder une autorisation de sĂ©jour aux sans-papiers de longue date et de faire preuve de gĂ©nĂ©rositĂ© dans le traitement des cas de rigueur. Le PEV soutient une politique de rĂ©installation modĂ©rĂ©e et une clĂ© de rĂ©partition Ă©quitable au niveau europĂ©en. Il convient pour le PEV de conclure davantage d’accords de rĂ©admission afin de garantir une mise en Ĺ“uvre rapide et cohĂ©rente.

La politique d’asile n’est pas une prioritĂ© des vert’libĂ©raux. Le sujet est d’ailleurs traitĂ© en termes brefs et gĂ©nĂ©raux dans le programme du parti. On peut y lire: La Suisse « doit continuer Ă  offrir un refuge sĂ»r pour les personnes persĂ©cutĂ©es Â». A cette fin, « les procĂ©dures d’asile doivent ĂŞtre rapides et les abus combattus Ă©nergiquement Â». Le PVL s’engage pour une Suisse ouverte et connectĂ©e au monde, qui privilĂ©gie la solidaritĂ© et la coopĂ©ration en matière de politique d’asile internationale. Le parti ne formule aucune exigence en faveur d’une protection renforcĂ©e des personnes rĂ©fugiĂ©es. Pour les vert’libĂ©raux, l’intĂ©gration exige des personnes en quĂŞte de protection qu’elles fassent preuve de bonne volontĂ©: « Dans ce domaine aussi, le principe de la responsabilitĂ© individuelle s’applique. Cependant, l’Etat doit soutenir l’intĂ©gration. Â» Les personnes qui s’intègrent avec succès doivent pouvoir obtenir la nationalitĂ© suisse sans «exigences administratives trop Ă©levĂ©es». Il importe en ce sens de se fonder sur « des critères clairs dĂ©montrant l’intĂ©gration et non sur la simple durĂ©e de sĂ©jour Â».

Le PDC exige une « politique d’asile contrĂ´lĂ©e Â» et fait souvent preuve d’une attitude ambivalente dans ce domaine. S’il s’agit d’accorder l’asile aux personnes en quĂŞte de protection, la Suisse « ne doit pas ĂŞtre un pays de destination attractif Â». Le PDC s’engage pour une coopĂ©ration au niveau europĂ©en, pour « une politique d’accueil plus juste en ce qui concerne la rĂ©partition des demandeurs d’asile dans le cadre de l’accord de Dublin Â» et pour une meilleure « participation aux renvois en commun via Frontex Â». L’aide au dĂ©veloppement devrait se concentrer davantage sur les « problĂ©matiques liĂ©es Ă  la migration Â» et d’autres partenariats en matière de migration, y compris des accords de rĂ©admission, devraient ĂŞtre conclus afin d’assurer une mise en Ĺ“uvre stricte. Les rĂ©fugiĂ©-e-s reconnu-e-s et les personnes admises provisoirement devraient ĂŞtre mieux intĂ©grĂ©s sur le marchĂ© du travail « s’il apparaĂ®t qu’ils resteront en Suisse durablement Â». Toutefois, le PDC souhaite que la responsabilitĂ© et les coĂ»ts de leur intĂ©gration soient assumĂ©s exclusivement par la ConfĂ©dĂ©ration. Il demande que des « conventions d’intĂ©gration claires Â» soient conclues et que « seules les personnes bien intĂ©grĂ©es Â» soient naturalisĂ©es.

Le PBD prĂ´ne une « politique d’asile efficace et crĂ©dible Â». Il entend par lĂ  des procĂ©dures rapides et correctes, qui comprennent une protection juridique, mais aussi des restrictions et une lutte stricte contre les abus – si nĂ©cessaire via des « mesures impopulaires Â». Le PBD se situe au centre-droit de l’échiquier politique sur les questions de politique d’asile, mais il s’associe parfois aussi Ă  la gauche pour crĂ©er des majoritĂ©s. Il dĂ©fend une mise en Ĺ“uvre cohĂ©rente de l’accord Dublin et une coopĂ©ration et une coordination internationales avec les pays voisins et les institutions europĂ©ennes. Le parti est divisĂ© sur l’admission provisoire: en principe, le statut est pour le moment justifiĂ© tant que les personnes concernĂ©es resteront «menacĂ©es chez elles». Toutefois, le PBD estime que cette situation ne devrait pas durer « plus de dix ans, voire davantage Â». Toute personne qui bĂ©nĂ©ficie d’un droit de sĂ©jour devrait s’intĂ©grer le plus rapidement possible et des mesures d’intĂ©gration devraient ĂŞtre mises en Ĺ“uvre. En particulier, le PBD privilĂ©gie une « meilleure et plus efficace insertion dans le processus de travail Â».

Le PLR dĂ©fend une politique d’asile restrictive, mĂŞme si certain-e-s candidat-e-s sont plus nuancĂ©-e-s. Il s’engage pour des procĂ©dures rapides et correctes, qui ne devraient toutefois pas ĂŞtre « bloquĂ©es par d’interminables voies de recours Â». Le PLR souhaite que les personnes rĂ©fugiĂ©es obtiennent un droit de sĂ©jour Ă  long terme et soient intĂ©grĂ©es « uniquement lorsque leur profil correspond aux critères de la Convention de Genève Â». Le PLR tient Ă  l’admission provisoire « afin d’éviter de crĂ©er une zone grise entre le statut de rĂ©fugiĂ© et celui de demandeur d’asile destinĂ© au renvoi immĂ©diat Â». Il souhaite la conclusion d’accords de rĂ©admission et une mise en Ĺ“uvre cohĂ©rente des expulsions, avec pour levier l’aide au dĂ©veloppement. Le PLR veut limiter le regroupement familial, conclure des conventions d’intĂ©gration contraignantes et augmenter la participation de la ConfĂ©dĂ©ration aux coĂ»ts engendrĂ©s par sa politique en matière d’admission. Il rejette l’implication de la Suisse au sauvetage en mer et l’augmentation des contingents de rĂ©fugiĂ©s. 

L’UDC dĂ©fend une politique d’asile extrĂŞmement restrictive, qui repose sur un durcissement de la lĂ©gislation, une approche isolationniste et une politique de repli. L’UDC exige ainsi que la protection des frontières soit « renforcĂ©e par des mesures architecturales et des contrĂ´les plus intenses Â». Elle estime que l’accord Dublin ne fonctionne pas, mais exige toutefois que la Suisse l’applique strictement. Les personnes qui arrivent de pays tiers sĂ»rs ne devraient plus ĂŞtre autorisĂ©es Ă  demander l’asile. L’UDC entend Ă©galement rĂ©duire massivement d’autres droits fondamentaux: interdiction de voyager, interdiction du regroupement familial, rĂ©duction des prestations de soutien Ă  tous les niveaux ou l’introduction d’une « caisse-maladie au catalogue de prestations rĂ©duites Â» pour les requĂ©rant-e-s d’asile, les sans-papiers et les personnes admises provisoirement. L’UDC s’oppose Ă  la gratuitĂ© des soins mĂ©dicaux de base ainsi qu’à la protection juridique des personnes requĂ©rantes d’asile. Pour l’UDC, l’intĂ©gration est une obligation absolue. MĂŞme pour les personnes admises provisoirement, l’UDC exige un « renvoi rapide Â» et demande que la Suisse « renonce Ă  les intĂ©grer dans le marchĂ© du travail Â».

Des chances équitables, ensemble pour les personnes réfugiées.

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